C’était le dimanche après-midi. Pour une fois il bossait pas, pour une fois il ne sortait pas, pour une fois il n’avait rien à livrer pour un client, pour une fois personne n’avait besoin de lui pour une quelconque tâche. Il s’était levé tard, en début d’après-midi et avait mangé des pâtes au lieu de petit déjeuner des céréales. Kaïs s’ennuyait à en mourir, mais d’un côté, rien faire c’est cool. Il avait l’temps pour lui, le temps pour rien faire.

Un short de basket, un pull avec la capuche redressée sur la tête, il s’était mis à l’aise, enfoncé dans le canapé. Il avait une manette de play entre les mains, la dernière, la IV et une clope déglinguée entre les lèvres qui était encore éteinte. Trop concentré le gamin sur ce jeu qui lui grillait le cerveau. Un jeu d’horreur, qui lui faisait manquer la crise cardiaque à chaque monstre. Il avait peur, c’est pour ça qu’il y jouait en journée.

Il se concentra à nouveau, totalement immergé. Et puis boum, il s’fait choper. Il sursaute à en faire tomber sa clope. Bon sang, c’est toujours la même rengaine avec ce genre de jeu. Habituellement, il en fallait beaucoup pour effrayer Kaïs. Mais quand il s’agit de zombie, ou d’exorcisme, il flippe. Et là, c’était des zombies. Kaïs leva le regard, enfin l’esprit déconnecté de son jeu. Il reconnait la tignasse de ed et il sourit.

« T’as quelque chose d’prévu pour aujourd’hui ? T’veux pas m’aider à finir ce putain d’jeu ? Ces zombies c’est des fils de pute. » il souffla, puis posa la manette à côté de lui pour enfin allumer sa cigarette tordue.

Il l’aimait bien Ed, c’était un bon gars. Mais il le connaissait pas plus que ça, pas encore.

Code by Sleepy

Il ouvre les yeux pour les fermer une seconde après agressé par la lumière extérieure. Il veut pas, Ed, entendre parler de l'air frais et des piafs qui chantent, encore moins du soleil qui se fous de sa gueule et d'autres conneries. Dans ses rêves, il est a nouveau à Paris, avec papa, maman et sa petite amie. Et tout est normal, tout est comme sur des roulettes. Alors il dort, encore et encore Ed, pour que ça ne s'arrête jamais, qu'il retrouve par la réalité. Il veut se perdre dans ses rêves jusqu'à ce que la faim gagne. Il se passe bien deux heures avant qu'il tente autre chose, mais impossible de bouger. Ed, il est vissé dans ses draps, dans son lit, dans sa piaule, dans ses couvertures qui sentent la sueur et dans son pyjama qui n'en est pas un, parce qu'être en caleçon c'est pas la tenue la plus habillée qui soit.  Il reste comme ça à fixer le plafond pendant encore une heure ou deux, mais tout passe trop vite quand on est occupé. Et Ed, il est occupé à être dans ses pensées. Il écoute les bruits de la ville, les bruits de la vie, les voisins, les copains, les colocs, qui claquent les portent, qui disent qu'ils s'en vont - pourvu que certains revienne par, surtout Ninon - et quand tout se calme, il bouge enfin.
Il fait un tour devant la glace, il se refait la face puis il débarque sur le salon et se retrouve devant Kaïs qui s'emballe sur la console. C'est bien qu'il soit là Kaïs, Ed il l'aime bien, beaucoup même. C'est le premier visage qu'il a croisé en s'installant, c'est le mec chill, bien pensant, le petit smoke weed man dont on a tous besoin. Il est génial, Kaïs et sans doute grâce à lui, y a une console dans la baraque. Il est pas très geek Ed, mais il aime bien jouer quand il passe pas sa journée devant Netflix, en secret, parce que c'est pas sa console non plus. Déjà qu'il est pas foutu de partager ses identifiants pour que les amis profitent des séries. Alors il sourit vraiment Ed et il accepte l’invasion. Je viens à ta rescousse.   Il prend place à coté de lui dans le canapé et attrape la manette. Les zombies, c'est comme dans the walking dead, à force de regarder ça à 4h du matin il a fini par plus vraiment flipper, surtout qu'en réalité ça fait moins peur quand on imagine quelqu'un à la place des cadavres. Et bam, dans la tête de celui qui essaye toujours de se glisser par derrière. Il termine la première partie du niveau avant d'abandonner devant la prochaine vague d'ennemis. On avait dit pas les mamans, ces zombies par contre c'est tous des poulets j'suis sur, ils veulent nous emprisonner. En taule Kaïs, imagine, c'est plus flippant que ces machabés. Ed il fait comme tout le monde il insulte et aime pas les flics, il invente une histoire pour faire rire, il décrédibilise le jeu et de toute suite il se dit que oui, ça le fait moins flipper lui. Il zieute le bâton entre ses lèvres et se demande, bonne, mauvaise idée et finalement ça plomberait l'ambiance de faire le gars rangé. Kaïs, il le voit comme le mec dans silence ça pousse mais avec une feuille de cannabis au milieu des hortensia. Tu fumes quoi aujourd'hui ? Ils disent que ça rend aimable, plus convivial. Et c'est vrai que même si l'odeur du shit et de ces merdes là c'est pas les meilleurs, c'est tout ce dont il a besoin quand il est fatigué de se supporter. Et peut-être que ça rendra les zombies plus aimable. On va les avoir ces enculés et sauver le monde tu vas voir. Comme ça, il fait presque révolutionnaire. Engagé pour quelque chose.