Deux verres de jäger, pour le courage, et Alban quitte sa soirée, prématurément, c'est vrai, mais il a de grands plans le gamin, vraiment, cette fois, c'est pas des conneries, y'a un truc, là, cette nuit, c'est spécial, cette nuit, ce sera à marquer d'une pierre blanche, il  en est persuadé, officiellement, mais officieusement, il pourra pas l'enlever, cette petite crainte, là, au fond d'son cœur, indélébile, celle d'se faire avoir, d'passer pour un con, là, encore une fois. Mais peu importe, il est motivé, pire que ça, il est persuadé que c'est la bonne chose à faire, là, la résolution de tous les problèmes, l'pauvre con, il est persuadé d'résoudre le conflit israélo-palestinien. Un illuminé, presque. Alors, il arrive, là, pimpant, tout frais, tout motivé, devant ce putain d'immeuble, qu'il commence à connaître par cœur, là, et il sonne, à ce même interphone, comme avant, comme toujours, comme ce qu'il doit s'passer, là, c'est bien, c'est bien. "Salut?" il d'mande, là, quand ça répond, et puis, sur l'moment, il s'met à douter, genre, ça s'trouve c'est Jonathan qui a répondu, et il doit faire je n'sais quoi d'bizarre, pour qu'il accepte de lui répondre, style, sonner six fois. " Lou? Lou, faut que tu m'ouvres, vraiment, tu vois?" il a l'espoir con, vraiment con, qu'elle ait le même sentiment, là, que, cette nuit, c'est spécial, cette nuit, ça ira, cette nuit, ils iront mieux ensemble. Mais, comme un con, il lui a rien expliqué, là, du pourquoi, du comment, rien, elle sait rien. Il est sobre, mais, Alban, poussé par l'adrénaline, ou quelque chose comme ça, là, il rigole, comme un con, parce qu'elle sait pas, elle sait pas ce qu'il lui traversait la tête, depuis quelques jours, elle sait pas que y'a encore une chance, entre eux, même plus qu'une chance, une réalité, une certitude, putain, qu'il est sûr de lui ce soir. "y'a pas d'histoire de briquets ce soir, j'veux juste te voir, enfin, non, faut qu'on se voit, tu comprends?" putain, si elle pouvait avoir accès à ses pensées, là, à ses certitudes, elle comprendrait, même s'il sera jamais capable de l'expliquer, elle comprendrait. Mais, comme un con, il sonne à nouveau, là, et il attend, parce qu'elle est forcément là, il s'dit, c'est pas possible, sinon.

ce soir c'est soirée télé entre lukas et toi. interrompue lorsque l'interphone se met à sonner, tu délègues la tâche d'aller répondre et t'imagines que c'est diego ou jonathan qui a la flemme de sortir ses clefs. mais, quand il se met à gesticuler pour capter ton attention, tu lui jettes un coup d'oeil et tu vois sur ses lèvres s'articuler : alban.
cinq lettres qui te figent, et ton coeur manque un battement.
ton premier réflexe est de lui faire signe de dire que tu es absente, trop peu préparée pour ce qui t'attend. mais, il s'obstine, refuse, je te passe lou, qu'il dit, le traître. tu fais signe qu'il ne paie rien pour attendre, avec un mouvement comme si tu comptais l'égorger un peu plus tard. t'attrapes le combiné, trop tard pour reculer, alors t'avances, mais tu sais pas où, tu sais pas comment. quand t'entends alban balancer des mots par ci par là, panique, indécision, autant de sentiments que tu n'avais pas prévu de ressentir ce soir.
depuis la dernière fois que vous vous êtes vus, t'as remué tous tes souvenirs pour tomber sur le bon et démêler le vrai du faux. sans succès. tu sais juste que, tu t'es réveillée dans son lit, vide, le lendemain de la soirée avec mado, vêtue d'un t-shirt à lui. et c'est le fait qu'il n'était pas là qui remue un couteau dans ton égo. cette nuit-là est synonyme de néant et tu ne peux pas t'empêcher d'imaginer le pire.
tu te rappelles qu'il faut respirer, alors tu prends une grande inspiration et tu appuies sur le bouton "ouvrir", sans un mot.
cette explication était nécessaire, mais ton imagination pour l'instant était suffisante. la vérité te fait encore bien trop peur pour que tu ne sois capable de l'affronter.
lukas comprend sans même un mot de ta part que vous allez avoir besoin d'un peu d'intimité et il s'en va aussitôt dans sa chambre.
t'inspires, t'expires. quand ça toque à la porte, ton coeur s'arrête.
tu ouvres.
et ton coeur repart. palpite. s'excite. c'est l'effet alban.

Y'a ses doigts qui pianotent nerveusement sur la porte, là, et il sonne, et il attend, et il sonne, et il attend, mais il perd pas espoir, non, pas ce soir.  Et y'a quelqu'un qui répond, mais c'est pas Lou, alors, ravale ton discours Alban, et patiente mon gars. Et finalement, c'est elle, il parle à nouveau, Alban, et encore une fois, il attend, mais, c'est pas grave, dans sa tête, il a toute la nuit, dans sa tête, y'a rien qui peut l'arrêter cette nuit, même pas elle, non, non. Et y'a l'bruit de la porte qui se déverrouille, mais pas d'voix de Lou, rien, juste la porte qui l'invite à rentrer, et Lou aussi, implicitement. Il grimpe les escaliers, tranquillement, c'est vrai que y'a cette petite boule au ventre qui commence à apparaître, là, au fur et à mesure qu'il grimpe les marches, mais il s'laissera pas abattre. Et puis, la porte, devant ses yeux, sa main qui frappe dessus, trois coups, une pause, la porte s'ouvre, et y'a Lou. Et Alban, il aimerait bien dire à son cœur d'arrêter de battre si fort, d'arrêter de s'emballer, c'est bon, c'est Lou, y'a rien d'flippant, ouais, rien d'flippant, putain, mais son corps, il a pas l'air de le comprendre ça. Alors, Alban, il prend une grande respiration, là, et il ferme la porte. C'est drôle, il était persuadé qu'en arrivant, qu'en la voyant, les mots sortiraient tous seuls de sa bouche, qu'ils flotteraient un petit instant, qu'ils seraient beaux, en tout cas, jolis à entendre, et qu'elle apprécierait, et que ça se passerait bien, mais, manque de bol, non, ça s'passe pas comme ça, y'a rien qui sort, rien d'automatique, alors, il sourit, comme un con, il s'avance un peu. Parce que, finalement, y'a beaucoup de choses qui aimeraient sortir, beaucoup de questions, pourquoi t'es partie, lou, j'ai pris soin de toi bordel? et puis, cette histoire avec léo, là, faudrait lui expliquer, à Alban, parce que ça l'fait flipper, il a quoi d'plus, lui? "j'ai envie de toi Lou" et c'est ces mots-là qui s'échappent d'entre ses lèvres, et puis, merde, après tout, léo, il hésite pas, lui, il a pas l'air d'avoir de doutes, lui, c'est peut-être ça, la grande différence entre eux, alors, Alban s'avance encore, un petit pas encore, et y'a sa main qui glisse sur son bras à Lou, et ses yeux qui restent scotchés dans les siens, et ses lèvres, qui frôlent les siennes, assez rapidement, avant de l'embrasser, tout simplement, pour qu'elle comprenne, qu'elle comprenne bien son envie, sa sincérité, y'a plus de retour en arrière possible, maintenant.

quelques secondes passent.
et puis, il articule quelques lettres, qui deviennent des mots, qui se transforment en berceau pour ton petit coeur. des paroles que tu n'aurais jamais cru entendre. qui te laissent là, pantelante, hésitante, dans l'expectation de ce qui va suivre. pas le temps de répondre, qu'il s'approche, laisse courir ses doigts sur ta peau, se penche et fait captives tes lèvres des siennes.
l'incrédulité perfore un millions de trous dans ton coeur. il se fissure sous la surprise, se reconstruit sous le bonheur. c'est toujours un plaisir d'embrasser alban. tu te délectes de ce moment ; au final, c'est quand il ne parle pas qu'il est le plus agréable. et, t'aimerais pouvoir mettre ton cerveau en pause si c'était possible, afin de ne pas avoir à réfléchir sur la situation. mais, c'est la dégringolade, c'est la débandade. il se pointe comme ça, la fleur au fusil, te bouscule, te fait basculer, de la falaise sur laquelle vous étiez, en équilibre précaire lorsque le vent ne soufflait pas trop fort.
il ne t'a pas laissé le choix, mais il n'a pas forcé non plus.
deux scénarios te viennent à l'esprit.
soit tu l'enlaces, fort, plus fort encore, tu le retiens, tu le tiens, comme s'il allait s'envoler sans ton petit poids pour le garder sur terre, parce que c'est le paradis qui vous attend, cela ne peut pas être autrement. vous n'avez pas vaincu des montagnes pour respirer une petite brise, non, c'est le 7e ciel et c'est le vent de liberté qui devraient vous accueillir. tu voudrais lui chuchoter mille mots mille merveilles, lui murmurer toutes les étoiles qui parsèment ton coeur et les perles dans tes veines. toute cette attente, toutes ces incertitudes, cette incapacité à s'aimer, ces hésitations ; disparues, envolées, poussières.
mais,
il y a toujours un mais
tu poses alors tes deux mains sur son torse pour le faire reculer, pour reprendre ton souffle et essayer de récupérer le semblant d'idées claires qu'il te reste, tous tes boucliers abaissés, toute ta force absorbée.
heu ? alban ? t'as bu ?
c'est comme une évidence. il ne peut pas débarquer comme ça, dire des mots comme ça, et t'embrasser comme ça, en étant sobre. il a besoin de courage pour le faire, il a besoin d'alcool, mais encore une fois ton coeur penche. est-ce bien ? est-ce mal ? qu'il ai besoin d'alcool pour t'approcher. c'est mal. bon sang, où allez-vous, comme ça, si vous êtes incapables de vous voir sans éthanol dans le sang ?
ça vaut rien si l'un de nous deux a bu, tu le sais hein ? ni si c'est pour t'excuser ou te rattraper
lou putain bordel de merde ferme ta gueule. mais t'es loin d'y être, loin de la vérité, loin de te douter, que c'est pas l'alcool, que c'est pas des excuses, que c'est pas une tentative pour se rattraper, non. c'est la compétition. c'est léo, c'est lui, qui est entré dans le game. t'es un putain de trophée, lou.

C'est vrai qu'après tout ce temps passé à danser ensemble, comme ça, à s'dire oui, à s'dire non, deux pas en avant, trois en arrières, Lou se devait d'être compliquée, là, de venir dans la petite tête d'Alban, d'exploser tranquillement la petite bulle qu'il s'était construit, l'futur qu'il s'était imaginé, l'scénario qu'il avait écrit, mais, c'est normal, c'est Lou, c'est elle, et puis, c'est lui aussi, c'est prévisible, inévitable. Mais, il faut qu'elle comprenne qu'Alban, il veut plus jouer à ça, la danse, ça a jamais été son fort, de toute manière, et l'implicite non plus, il veut plus la laisser repartir en arrière, plus maintenant, plus jamais, il la laissera pas faire, pour une fois, il est prêt à s'battre, ouais, vraiment, pour une fille, à sortir les crocs, les griffes, et tout ce qu'il faut sortir, mais, en douceur, parce que c'est Lou.
Ses mains qui s'posent sur son torse, et le repousse, mais c'est pas grave, tu sais, Lou, cette nuit, il en faudra plus pour t'en débarrasser, de ce con qui te court après depuis un an. Il faudrait juste qu'elle comprenne, que, c'est bon, ils sont prêts, vraiment, après un an de préparation, de préliminaires, c'est le moment, et quand elle aura compris, ils auront réussi, ils auront peut-être même grandis, là, mûris ensemble. Une nouvelle distance, entre eux, mais, ça lui semble minime, et cette fois, elle lui semble pas insurmontable, cette distance, vraiment pas. Il est persuadé que ça ira, qu'elle comprendra. Il est peut-être con, ceci dit. "non" il répond, à sa question, qu'il comprend, parce qu'ils sont décidément incapable de passer un temps ensemble sans que ça n'vire au désastre en étant sobre, et puis, merde, y'a son haleine qui l'trahit peut-être, putain. "enfin, oui, mais deux verres, c'est rien, j'suis sobre" et il l'est, le pire, mais, allez savoir c'qu'elle en pense, Lou. Et ses mots, à nouveau, très justes, évidemment, faut croire que pour une fois, elle a raison, Lou. Elle parle d'excuse, il comprend pas, mais, fous pas tout en l'air, Alban, hein ? La fierté, il l'a met de côté, ce soir, cette nuit, il relève pas, on verra plus tard. Il secoue la tête, il s'assoit, là, sur le canapé, il rigole, un peu, il s'sent euphorique, et c'est pas l'alcool, putain, c'est pas ça. "mais si tu veux, on attend deux heures, trois heures, on s'mate un film et on reprend ça après, j'bouge pas, j'suis là, j'ai pas d'plan, pas cette nuit, ni demain, ni dans la semaine, ni jamais." il a pas envie de mettre les voiles, et puis, faut qu'elle comprenne qu'il est là, qu'il veut être là, alors, ouais, il s'assoit, et il attend, tranquillement, confiant, putain de confiant, parce que, ce qui lui manquait depuis l'début, c'était peut-être ça, la confiance.

il y a comme une lueur dans le regard d'alban, que tu déceles sans reconnaître et ça te fait peur. ça t'effraie de remarquer un changement, pour le meilleur ou pour le pire, un changement de direction dans votre relation.
ça ressemble à de la détermination.
et à un peu de mensonge aussi. non, qu'il ose dire quand tu lui demandes s'il a bu. heureusement qu'il se reprend, qu'il rétablit la vérité sans attendre, ça lui aurait fait perdre toute sa crédibilité et t'étais prête à le renvoyer chez lui dans l'instant.
tu le regardes, un peu méfiante, pas sûre des raisons de sa présence, lorsqu'il va se poser sur le canapé en rigolant, comme s'il était chez lui. comme si ce n'était pas bizarre qu'il soit là, après ton réveil dans son lit et sans lui. les explications viendront.
mais, on attend quoi ? on reprend quoi ?
si c'est des bisous qu'il veut, ça te conviendrait bien mais ça ne te suffirait pas. il a l'air tellement heureux que tu galères à garder les idées froides, à alimenter ta rancoeur et te souvenirs de vos erreurs. sa bonne humeur est contagieuse mais ses promesses sont dangereuses.
et tu te laisses tenter, en espérant cette fois ne pas te brûler. tu le rejoins sur le canapé.

Et Lou, qui comprend pas, qui comprend toujours pas, au bout d'un an, sérieusement, c'est vrai qu'Alban peut être lent sur certaines choses, mais, là, vraiment? Et elle semble méfiante, aussi, comme s'il allait lui mentir, à elle, maintenant, à quoi bon, c'est tout tracé, non? Et elle doit forcément commencer à bien l'connaître, maintenant, sinon, à quoi bon? "j'sais pas, si tu préfères être sûre que j'ai 0g d'alcool dans l'sang" il hausse les épaules, parce que, ça lui va, maintenant, il peut attendre encore une heure, deux heures, il est plus à ça prêt, l'petit, qui l'eût cru, là, qu'il courrait après une fille comme ça, et aussi longtemps, mais, c'est bien c'qu'il s'passe. Et elle trouve quand même le moyen de douter de lui. "et on reprend c'que tu veux" bon, c'est vrai, c'est vague, c'est facile, mais elle vient sur le canapé, elle aussi, c'est déjà ça. "putain lou, ça fait genre un an?" il demande, il affirme, quelque chose comme ça, ça date, faut qu'elle le comprenne, qu'il serait pas là, à lui courir après, au bout d'un an, s'il y avait pas quelque chose, dans son cœur, là, s'il ne l'avait pas en tête, tout l'temps. "tu crois pas qu'on devrait arrêter ces conneries?" il lance, là. "mais sinon, j'ai toujours envie de toi." pour mémo, là, parce que, quand même l'idée de lui faire l'amour, enfin, est quand même plus tentant qu'avoir une conversation, peut-être la conversation.

tu t'assois à côté de lui et vos peaux s'électrisent lorsqu'elles se frôlent, se touchent, ce qui te ramène à quelques minutes auparavant lorsque vos lèvres s'étaient rencontrées. merde. comment une soirée peut-elle déraper aussi vite ?
tu sais pas quoi dire, tu sais pas quoi penser. t'as jamais été aussi perdue que maintenant. parce que, même si t'espérais par dessus tout réussir à mettre fin à vos guerres perpétuelles, t'as jamais réfléchi au moment où ça arriverait. tu l'as même jamais imaginé. tu l'avais fatalement acceptée, que votre relation était écrite ainsi, tu commençais peut-être même bien à t'habituer, à ces déceptions et à ces brisages de coeurs sans espoir permanents. comme quoi, la douleur est vicieuse, elle s'installe et prend la place d'une amie, toujours là, presque fidèle.
la suite titille ton agacement, c'est toujours la même chose avec alban. il reste évasif, se garde une porte de sortie pour faire le lâche, te laisse prendre les décisions par peur de poser ses couilles sur la table. mais lorsqu'il reprend la parole le début de ta colère redescend. un an. tu répètes dans ta tête. un an, un an, un an, que vous perdez votre temps ? pour le coup, un milliard de mots se bousculent aux portes de ta bouche, mais tu les retiens parce que si tu les craches ça risque d'être moche. la pression monte et pour l'inverser tu hurles dans ton crâne. un an quoi ? un an que qu'il a pas baisé ? nan nan il y a quelques jours encore tu débarquais et tu découvrais une fille dans son lit. un an que vous vous torturez ? oui. un an. beaucoup trop de temps. tu trouves ça triste au fond, qu'il faille un an pour réaliser que vous vous aimez trop pour vous détester autant. putain mais qu'est-ce qui cloche chez vous ?
ces conneries ? on devrait arrêter ? tu répètes ses mots, bouche bée. ou tes conneries, plutôt ? vu l'incompréhension dans son regard, tu t'expliques. il y a quelques semaines je trouve une nana à poil dans ton lit quand je viens m'excuser. regard appuyé. aaaah, celle là tu n'es pas prête de l'oublier hein. d'ailleurs, si tu pouvais recroiser la gazelle pour te défouler un coup ce serait pas joli-joli. et pas plus tard qu'il y a quelques jours je me réveille, dans ton lit, et toi, parti, dieu sais-je où ? enfin vous rentrez dans le vif du sujet. ta voix monte dans les aigus. c'est pas bon signe généralement. j'me rappelle de rien de cette nuit là, alors stp, dis moi qu'on a rien fait ensemble parce que, de 1) tu t'es faite une promesse, tu ne seras pas une fille de plus sur la liste des conquêtes d'alban, s'il veut t'avoir il devra te mériter, de 2) si t'as couché avec alban t'aimerais quand même t'en souvenir, merde, et de 3) si tu t'en souviens pas, c'est que c'était pas si bien comme tu l'imaginais, merde encore plus ???

Mais, comment c'est possible, que ça lui semble limpide, là, à Alban, et pas à Lou? Pourquoi elle comprend pas, elle l'fait exprès, encore, elle le provoque, une dernière fois, comme ça, pour être sûre? Mais, ça marchera pas, il s'y refuse, Alban, même si, Lou, elle commence, avec les mêmes reproches, les mêmes histoires, mais, à quoi bon? Ils l'ont déjà eu, cette dispute, pourquoi elle reste coincée dans l'passé, elle? Pourquoi elle veut pas avancer? Pourquoi elle a peur, comme ça, toujours la trouille d'aller un peu trop vite, là, alors que, ça fait un an? Il voit bien, qu'elle s'énerve, un petit peu, ils sont condamnés aux paroles qui font mal, aux émotions un peu trop fortes et aux regards assassins, vraiment? Putain, mais non, c'est pas possible.
Il l'écoute, parce que, si elle s'raisonne pas, elle, c'est pas grave, lui, il est là, il peut raisonner pour deux, il peut encaisser, il s'dit qu'il peut les tirer du bateau, là, celui où ils sont depuis un an, et qui prend l'eau, de plus en plus, putain, il a la solution l'cheat code, pourquoi elle veut pas ? Et elle aborde cette nuit, la même nuit qui repasse en boucle, dans sa tête, au gamin, la nuit parfaite, la nuit idéale, à quelques détails près. A croire qu'au final, ils arrivent à s'supporter quand Lou est saoule, est uniquement quand elle est dans cet état second. Il passe sa main dans ses cheveux là, et y'a un rire nerveux qui sort de sa bouche. "putain lou, quand je te dis qu'on doit arrêter nos conneries, c'est exactement ça" il répond, il s'emballe, il s'excite, peut-être qu'elle va comprendre, maintenant, avec cet exemple-là, même si elle est bornée, même si elle est têtue, et sa mauvaise foi légendaire, au bout d'un moment, la vérité, elle devrait lui éclater au visage, comme à Alban, et ce sera plus clair, pour elle aussi. " tu m'en veux parce que j'suis parti, mais, j't'en voulais parce que t'étais partie, tu vois, le genre de problème? on est dans un putain de cercle vicieux, on peut pas continuer comme ça. Et puis, j'suis pas parti, pas vraiment, enfin, tu dormais, pas moi, j'suis allé t'chercher un truc à manger putain c'est tout" y'a ses yeux, là, qui plongent dans ceux d'Lou, elle va l'croire, pas vrai? si elle fait attention, vraiment attention, qu'elle le regarde, aussi, droit dans les yeux, sans peur, sans retenue, elle la verra bien, la sincérité, non? "et non, Lou, on a pas couché ensemble, t'étais trop saoule" et y'a ses doigts, là, qui cherchent ceux de Lou, en plus de son regard qui est décidé à accrocher avec le sien. "qu'est-ce que tu veux que j'fasse?" peut-être qu'il aurait du poser cette question bien plus tôt, en fait.

à vrai dire t'aimerais bien te laisser aller là. poser ta tête sur son épaule, enfouir son nez dans son cou et respirer son parfum, savoir qu'il va rester dormir, passer la nuit avec toi, ne plus jamais te quitter, ne plus jamais tout bousiller.
mais t'y crois pas.
comment ? comment y croire ? après un an à se pourchasser, à se blesser, à se récupérer, à la petite cuillère ou au couteau, comment y croire ? comment être sûre, que maintenant, est le bon moment pour se dévoiler, baisser les armes, comment ?
c'est la détresse dans ton regard.
tu piges pas, t'essaies, mais tu comprends pas. où il veut en venir putain ? pourquoi il pose pas des mots sur les "ça" ? il les balance à tour de bras, sans les définir, sans les nommer, et t'es perdue.
alors c'est ça ta solution miracle ? tout oublier et recommencer à zéro ? que tu prononces, sceptique. la vérité t'y as jamais réfléchi, t'as jamais envisagé cette option et t'essaies d'imaginer ce que ça pourrait donner. mais t'es pas sûre d'être capable de faire table rase sur le passé et sur la réputation d'alban. t'es pas sûre de pouvoir donner ta confiance aveuglement, la trahison a bien trop un goût amer pour y avoir déjà goûté.
ou arrêter de s'engueuler ? mais.. t'as pas peur qu'on s'ennuie, après ? qu'on ait plus rien à s'dire ? t'hésites, entre le pathétique ou le foutage de gueule, c'est quoi ces raisons bidons que tu lui sors là, lou ? c'est quoi ces inquiétudes en carton que t'inventes là ? comme si arrêter de vous bouffer pouvait être une mauvaise chose, comme si le bonheur d'être heureux n'était pas assez puissant pour vous garder tous les deux.
mais tu le sens, alban, il est prêt à tout chambouler. et ce qu'il dit prend tout son sens, tu te sens conne pour le coup mais t'as trop de fierté pour avouer qu'il a raison. c'est vrai ? et tes yeux brillent, de savoir que tout ce que t'avais imaginé n'était que bullshit et que ses intentions n'étaient pas mauvaises. ce regard, droit dans le tien, transperçant, transcendant, tu planes, bien haut, dans le ciel. c'est fou ce don qu'il a pour te distraire.
encore une fois, il te rassure. il n'a pas profité de toi, alors que t'étais bourrée comme jaja et t'avais sûrement un panneau sur ta tête qui clignotait "open". mais non, il t'a respecté. alors,
dis-le. mais dis quoi au juste ? tout ce qu'il n'a pas encore dit, tout ce que t'as besoin d'entendre. pour l'instant, il s'est contenté d'énoncer son envie de baiser, "j'ai envie de toi", t'es ravie ma foi, mais c'est pas suffisant. ensuite il t'a proposé d'attendre, mais tu sais toujours pas quoi, et il t'a fait comprendre qu'il aimerait rester squatter chez toi, toute sa vie, bon, ça va que t'es patiente. il t'a proposé d'arrêter de se prendre la tête, grande idée qu'il a fallu un an pour admettre. et finalement, il t'a redit qu'il avait envie de ken. grand romantique le mec. alors t'attends la suite, allez, c'est bon, il faut qu'il se lance à un moment. c'est pas à toi de lui dire quoi faire, il a cru que t'étais un meuble ikéa livrée avec un mode d'emploi ou quoi ?

Elle est sceptique, Lou, mais, putain, s'il pouvait réussir à lui transmettre ce qu'il ressent, ce qu'il sait, s'il pouvait l'inviter à venir dans sa tête, dix, quinze minutes, le temps de comprendre ce qu'il est incapable d'expliquer, parce qu'il a jamais été talentueux quand il s'agit de communiquer, quand il s'agit de s'ouvrir, c'est brouillon, c'est toujours brouillon avec lui, mais dieu sait qu'il fait de son mieux, là, il s'applique, mais son esprit part un peu dans tous les sens, faut suivre, faut s'accrocher, faut essayer, rien qu'un petit effort de sa part, à Lou,, et il s'occupe du reste, vraiment. "oui? pourquoi pas, Lou? ça fait un an qu'on fait les mêmes erreurs, on peut pas espérer un changement si on fait rien de différent" il fait appel à sa logique, un peu, parce qu'il a raison, c'est évident, faut quelque chose qui change, là, pour essayer, pour voir, et avec un peu de chance, ils s'en sortiront vivants, vainqueurs, ça les sauvera, peut-être bien. Et y'a cette crainte qu'elle a, Lou, et, putain, Alban a pas pensé à tout ça, comprenez bien qu'il était déjà tout heureux d'venir avec une solution pourtant évidente, avec la détermination qu'il faut, parce que, c'était surtout ça qu'il lui manquait, finalement, alors, les conséquences, les possibilités, putain, il en sait rien, lui. "on verra" il souffle, parce qu'ils ont l'temps, et puis, merde, un problème après l'autre? la voilà qu'elle s'inquiète déjà des emmerdes de couples, de routine, ou quelque chose comme ça, mais, ils en sont pas encore là.
Son cœur s'emballe, un peu, à Alban, il a la sensation que le message se transmet, que petit à petit, elle comprend, elle adhère, petit à petit, il y arrive, à les réparer, là, s'ils étaient brisés, comme elle disait. Et il rigole, gentiment, quand elle lui demande confirmation. "mais oui, tu pensais quoi?" honnêtement, il est un peu déçu, un peu vexé, qu'elle le prenne vraiment pour un sale type, là, ce qu'il est pas, ce qu'il essaie de ne pas être, tous les jours, putain, il a pas était éduqué pour devenir un sale con, faut le comprendre, ça, il fait des erreurs, mais, y'a sa conscience, y'a sa moral qui lui reviennent vite dans la gueule et qui fait la grande différence entre ce qu'il est, et ce qu'elle imagine (ou ce que tout le monde imagine?) qu'il est.
Et merde. très vite, il éloigne sa main de Lou, il la pose sur sa jambe, là, merde, à se demander à quoi il s'attendait, ce con, en lui posant une telle question. Bien sûr qu'elle veut l'entendre, là, dire ces putains de mots, mais, merde, qui a décidé d'porter une telle valeur à de simples enchaînements de lettres ? Pourquoi? qui a décrété que dire une chose comme ça, ça engendrait autant d'angoisse, d'incertitude?
Un temps d'attente, une pause, une petite. Il passe ses mains sur son visage, il fait chaud, d'un coup, très chaud. Il souffle. "tu sais que c'est pas mon fort ça" Une autre pause, quelques secondes défilent, qu'est-ce qu'elle est belle sa table de salon, dis donc, c'est dingue, trouvée à ikea un coup sûr hein. Un rire nerveux. L'idée d'faire celui qui comprend pas est tentant, là, mais, il peut pas, pas avec tout ce qu'il vient de lui dire, c'est peut-être la dernière épreuve qu'il doit affronter. Mais la pire, sans doute. Mais, il est incapable de lui faire un beau discours, de jolis mots, qui la fassent sourire, rêver, fondre, putain, il est pas poétique le gars, il s'y prend n'importe comment, tout l'temps.  "écoute, j'peux pas te promettre une belle histoire, un beau mariage, des beaux gamins, tout ça, parce que, j'peux pas m'imaginer aussi loin dans le futur, et j'peux pas te promettre qu'on est fait l'un pour l'autre non plus, j'peux pas te promettre que ça va bien se passer, toutes ces choses, on peut pas le savoir avant d'essayer, tu vois?" respire, Alban, ça va bien s'passer. ce serait con de tomber dans les pommes si prêt du but. "mais j'ai envie d'essayer, j'ai envie d'être avec toi, parce que, je t'aime, tu comprends ? " et voilà la réalité qui vient lui foutre une droite, à Alban, c'est fait, plus de pirouettes possibles, maintenant, plus de retour en arrière, impossible de les reprendre, ces mots. Et puis, de toute façon, il veut les laisser à Lou, maintenant, qu'elle en fasse ce qu'elle veut, qu'elle s'en occupe, qu'elle en prenne soin. il est temps de la regarder, là, c'est ce qu'il faudrait faire, l'plus dur est passé, il se retourne, cherche son regard, qu'elle se fiche pas de lui, pas maintenant, trop vulnérable, l'bébé, maintenant. Et il se tait, maintenant, il reste silencieux, il attend rien, il demande pas à ce qu'elle lui réponde, il veut pas lui faire ce tour, qu'elle vient de lui faire. Non, lui, il veut qu'elle le dise, un jour, quand elle voudra, que ce soit spontané, sincère, imprévu, que ça lui échappe, comme ça, un matin, en mangeant un bol de céréales, qu'elle lève la tête, et qu'elle lui dise, je t'aime, sans réflexion, sans angoisse, sans enjeux.

à la recherche de l'embrouille alors que pour une fois il n'y en a aucune, mais c'est trop, trop, trop beau pour être la réalité, qu'as-tu fais à la vie pour mériter enfin un soupçon de paix ? sa chaleur t'attire mais t'as peur, d'un piège bien trop élaboré, de filets bien trop serrés, d'un appât avec lequel tu ne t'es déjà que trop empoisonnée.
t'es consciente que ce qu'alban t'offre là est un putain de cadeau tombé du ciel, qui n'admet aucun égal et que certaines personnes ne recevront peut-être jamais au cours de leur existence ; loin de toi l'idée de le gâcher mais, t'as peur. t'es terrifiée. et si, lorsque tu tendras le bras pour l'attraper, un petit démon derrière tirait la corde pour l'éloigner ?
tu trouves un nombre infini de "mais", de raisons stupides pour contrer votre destinée.
mais, et si, et si c'était juste nous, qui n'étions pas compatibles ? je veux pas que tu changes pour moi, et je veux que tu m'acceptes telle que je suis aussi
t'es consciente d'être relou à pointer du doigt votre impasse. à refuter toutes les solutions qu'il te propose, à les balayer d'un geste de la main comme si c'était facile pour lui d'en trouver de nouvelles, encore, et encore. mais t'as besoin de cette preuve, là, qui te permettrait de comprendre en quoi c'est différent, maintenant. "on verra", c'est se tourner vers l'avenir et se laisser guider, c'est abaisser tout contrôle quitte à se détruire. mais, "on verra", c'est aussi la promesse qu'il y aura quelque chose, après. ce "on" c'est aussi que tu ne seras pas toute seule dans cette histoire, qu'il sera là, que ce toi + lui formera quelque chose, et peut-être bien que ce sera bancal et même carrément instable mais, ce sera toujours un "nous" ?
je pensais que, à te place, je n'aurais peut-être pas été si sage.. tu serais limite tentée de faire la meuf vexée, qu'il n'ait rien tenté. genre tu l'attires pas assez en fait ? comme s'il pouvait te résister. et il essaie, ce con, tu vois là une tentative de s'échapper, de se dédouaner, est-ce qu'il croit vraiment que, "parce que c'est pas son fort" tu vas l'exempter de la tâche ? non. tu le laisses galérer un peu, vois jusqu'où il peut aller. pour toi. pour vous.
et puis les mots coulent de ses lèvres et il en découle que tu te noies dedans, tu tentes la brasse vainement pour essayer de t'en sortir, récupérer une bouffée d'air, remonter à la surface, mais tu sombres dans les espoirs qu'il fait naître en toi ; tu n'es plus que larmes et confusion et, lorsqu'il prononce ces fameuses et fatidiques sept lettres, tu laisses échapper un sanglot pour faire redescendre la pression qui menaçait de submerger ta tête et ton coeur qui rêve de s'échapper pour rejoindre alban. t'aimerais le faire répéter, encore une fois, encore un million de fois, pour pouvoir l'enregistrer, l'écrire sur des petits bouts de papier et les cacher dans ta vie afin de t'en souvenir, toujours, n'importe où et partout.
Ok.. que t'arrives seulement à articuler ; c'est trop d'émotions pour un soir, ou pour une année toute entière, que tu puisses supporter. d'habitude c'est toi la prêtresse des beaux discours et la manieuse des mots, mais il semblerait qu'il te les aies tous arrachés, volés, et qu'il ne t'en reste plus qu'un dans ton répertoire. Ok. que tu répètes une seconde fois, avec un peu plus de détermination après une grande inspiration, ça y est, t'as repris ton souffle, mais pas tes mots, pas ta voix, et ni tes larmes qui semblent une source inépuisable et ta seule façon de réagir proprement à sa révélation.
alors tu te rapproches et l'embrasse, comme si c'était la première fois que vos lèvres se rencontraient, bonjour, qu'elles disent, enchantées, qu'elles susurrent, retrouvées, réunies, heureuses, réconciliées.

et voilà, c'est cette impression de sortir enfin la tête de l'eau, d'être remonté, loin, et haut, comme ça, rapidement, merde, s'il avait su que leur sauvetage dépendait vraiment que de lui, forcément, il s'y serait pris un peu plus tôt, et puis, peut-être pas, finalement, ils se devaient peut-être de se laisser couler, un petit peu, pour trouver la force, la vraie, celle qu'on n'aperçoit que dans les moments critiques, quand la vie s'en va, là, cette force, exceptionnelle, impensable. parce que, quelques jours auparavant, alban ne se serait pas cru capable de ça, pas cru capable de laisser derrière lui sa rancœur, son râteau, les mots, les vilains mots qui sont venus s'écraser. à bout de souffle, là, parce que, se battre autant, pendant aussi longtemps, contre les sentiments, contre elle, contre lui-même, c'est exténuant, vraiment.
alors, il la regarde, brave, vraiment, pour une fois, un homme, un vrai, juré, et il se rend compte, seulement maintenant, c'est bête, que pour elle aussi, cette année a été éprouvante. elle aussi, elle a été abîmée, salie. il s'demande, comment elle a fait, pour tenir? elle a pas la même méthode qu'alban, c'est un fait. lui, il a préféré mettre de côté ses pensées avec l'alcool, souvent, à chaque occasion, genre, le ménage est fini, apéro, parce que, pendant le début de l'ivresse, ça fonctionnait, il oubliait, il oubliait vraiment, lou, elle était évincée de sa tête, comme ça, mais, l'alcool, c'est salaud, c'est traître, et c'est comme ça qu'il se retrouvait à toquer chez elle, totalement saoule et sans aucune volonté. c'est vrai que y'a eu d'autres filles aussi, ça, c'était sa pitoyable tentative de retrouver un peu de lou chez les autres. c'est pas pour rien qu'il s'est tapé que des blondes là, alors que, merde, normalement, son genre, c'était les brunes ténébreuses, voyez, mais, lou, partout, tout le temps, dans sa tête, avec les autres filles. mais, les points communs physiques, ça suffisait pas à activer son cœur comme quand il la voit, c'est con.
il se retrouve comme un con, face à ses larmes. "mais lou" il murmure, là, un peu ému, c'est vrai qu'il s'attendait pas à cette explosion d'émotions. et finalement, c'est elle qui fait le pas suivant, c'est elle qui s'approche, alors qu'alban, il osait plus, il savait pas, il attendait, et ses lèvres, ses lèvres qui l'ont obsédé un long moment, alban, reviennent sur les siennes, coucou, lou, tu m'as manqué, lou. doucement, il en profite, il veut pas tout gâcher, il veut plus tout gâcher, et puis, sa main retrouve sa peau, son visage, ses larmes, qu'il essuie, c'est cliché, mais, c'est pas réfléchi, c'est terminé, la merde, ils sont libres, putain, enfin. "je voulais pas te faire pleurer" il parle, doucement, remet une mèche derrière son oreille, là, caresse sa nuque. "jamais." il complète, là, comme pour s'excuser, de tout, d'avant, des disputes, des mots durs, des regards noirs, et puis, même des autres filles, parce que, si elle pleure pour ses mots, ce soir, il se dit qu'elle a du pleurer aussi, en le voyant avec cette fille, l'autre fois, putain, quel con tu fais alban.

tes larmes déstabilisent alban, manifestement il était loin de s'imaginer cette réaction de ta part. peut-être qu'il s'attendait plus à ce que tu rigoles ? que tu cries ? que tu t'en ailles ? tout, sauf pleurer. tu te vois là, dans ses yeux, pathétique et tu clignes cent fois pour chasser les vilaines qui te brouillent la vue et t'empêches de mater ce beau visage qui t'appartient désormais. t'essaies de mémoriser cet instant, chaque cheveu qui se rebelle sur sa tête, les plis sous ses yeux d'inquiétude et sa mâchoire carrée qui te murmure qu'il ne voulait pas te faire pleurer. ses doigts sur tes joues pour rattraper les dernières gouttes de pluie, estompées par votre baiser, salé, plein de promesses d'un avenir apaisé. tu t'accroches d'abord doucement à sa chemise, puis attrape un peu plus fort sa nuque, muée par un besoin de rapprocher vos deux corps engagés dans une distance trop élevée. t'approfondis le baiser parce qu'à ce stade les mots sont obsolètes et vos souffles entremêlés sont bien plus explicites que toutes les déclarations que vous pourriez rajouter. tu laisses courir tes doigts sur sa peau, dessinant mille histoires qui finissent bien, qui vous attendent. tu traces un sillon de feu, enflammant ses nerfs et se frayant un chemin jusqu'au plus profond de son être. ce soir, tu ne comptes bien délaisser aucune partie d'alban. aucun répit, aucun temps mort, ce sera aussi vif que passionné. un an d'attente. un an à ne pas gâcher. un an d'espérances à honorer. cette nuit. confiante, tu commences à déboutonner les boutons de sa chemise, un à un, parce que le temps vous appartient.

ça y est, le moment où alban s'excuse, peut-être à tord, peut-être à raison, mais, en tout cas, prêt à faire des efforts, et même tous les efforts du monde, pour que ça fonctionne entre eux deux. et puis, il part gagnant, déjà, on va dire, il a réussi à lui faire comprendre exactement ce qu'il avait en tête, c'est merveilleux, inespéré. franchement, qu'est-ce qui peut foirer, maintenant? alban, il a l'impression qu'ils sont ce couple -même si le mot n'a pas encore été prononcé, l'exclusivité n'est pas déclarée, mais, honnêtement, c'est tout comme, là, pour lui- qu'ils sont ce couple indestructible, maintenant, qu'ils ont tout surmonté, naïf comme il est.  et quand elle s'agrippe à sa nuque, y'a ce frisson qui s'empare de lui, ça y est, c'est le moment, ils ont franchi la ligne d'arrivée, il s'dit. et forcément, à ce stade, le baiser se fait plus profond, plus engagé, plus sérieux, plus appuyé. plus démonstratif, aussi, de ce qu'ils ressentent, réellement. et, enfin, il sent lou, qui devient curieuse, qui parcourent ses doigts sur sa peau, ça l'électrise, quelque chose comme ça. d'ailleurs, son souffle aussi, devient un peu plus profond, à alban, parce que c'est lou, parce que c'est ce qu'elle lui fait. très vite, ses bras l'entoure, pour la pousser à être plus proche, encore plus proche de lui, pour la sentir, vraiment, et, putain, c'est quoi ces tissus qui les séparent, là? alban a perdu la raison, parce qu'alban sent l'parfum de lou, alors, alban tire un peu sur elle, là, pour qu'elle soit assise sur lui, parce que, c'est plus facile pour la déshabiller, et c'est plus facile pour l'admirer, elle et ses cheveux blonds, elle et ses beaux yeux, elle et son joli corps. ses mains glissent, très vite, sous son t-shirt, elle a la peau douce, lou, douce et chaude, et il soulève un peu le vêtement, et puis le fait passer par sa tête, parce que, c'est ça en moins, et de toute façon, ses lèvres sont déjà occupées, là, à descendre dans sa nuque, et ses mains découvrent ses hanches, enfin, il était temps.

en un clin d'oeil tu te retrouves à califourchon sur ses genoux, le t-shirt à l'autre bout de la pièce et les seins presque à l'air, alors tu en profites pour jeter la chemise d'alban avec. peau contre peau, souffle contre souffle, la tension monte dans l'air en même temps que la tentation de s'emboîter là tout de suite sur le canapé. mais, t'avais oublié la présence de ton coloc, lukas, qui tousse dans sa chambre, tentative pour vous rappeler que vous n'êtes pas tous seuls. tu l'ignores délibérément, trop absorbée par les lèvres d'alban qui se promènent dans ton cou et ses mains qui commencent leur lente descente jusqu'à tes hanches : première étape. quant aux tiennes, elles mémorisent chaque grain de beauté sur son torse, ses épaules, ses abdos, et finissent par dessiner une ligne fine de haut en bas, s'arrêtant au commencement de son caleçon, enchainant sans interruption sur le V d'alban, ne lui laissant aucunement la chance ou le droit de reprendre son souffle. t'halètes un peu. tu te laisses aller, bercer, guider, un peu mais pas trop, t'as posé ton cerveau sur le côté pour t'éviter de penser et que te vienne l'hypothèse de tout arrêter. seules les sensations comptent, seuls ses doigts, ses lèvres, ses yeux et la petite bosse qui se forme, là, t'accaparent l'esprit.

ça se passait bien, ça se passait vraiment bien, jusqu'à ce que quelqu'un toque à la porte, le genre de truc urgent, mais, le genre de truc dont alban se fiche, là, tout de suite, parce que y'a lou contre sa peau "on s'en fiche " alors qu'il lui murmure, parce que, c'est vrai, qu'est-ce qui pourrait être plus important, qu'eux, à cet instant précis? il est prêt à soulever son petit corps, là, à l'emmener dans la chambre, pour être tranquille, pour, vraiment pouvoir s'abandonner.
mais. évidemment, il y a un mais. l'abruti pressé décide de parler. et l'abruti pressé s'avère être basile. putain, basile. forcément, très vite, il décolle ses lèvres de la peau de lou, rappel à l'ordre obligatoire. "merde" il souffle, il regarde lou, qu'est-ce que je fais, qu'est-ce qu'on fait ? pitié, qu'elle veuille pas faire l'vieux plan du type qui se planque dans le placard. il jette un oeil, mais, sa chemise est trop loin, et le t-shirt de lou aussi, et, faudrait déjà qu'il enlève ses mains de ses hanches, aussi, ce serait un bon début, mais, il a pas envie, parce que, putain, pas déjà?
et la porte s'ouvre, et tout est déjà trop tard, de toute manière. trop tard pour dire pardon, trop tard pour aller s'cacher, là, alors que c'est ce qu'il rêverait de faire, honnêtement, trop tard pour tout. il finit quand même par enlever ses mains, là, mais, c'est foutu, de toute façon. y'a son petit monde qui s'arrête, à alban, sa terre qui arrête de tourner, sa respiration coupée, le futur qu'il s'imaginait évaporé, parce que, basile. et comme un con, il se contente de le regarder, là, muet, parce que, qu'est-ce que vous voulez qu'il dise? c'est tout à fait ce qu'il croit, ce qu'il pense, la situation. pas d'excuse, pas de faux plan. juste alban, paralysé, comme un con, devant son meilleur ami, devant son frère, l'type chez qui il va, depuis tout gamin, quand ça va pas, l'type qu'il écoute, qu'il rassure, mais, comment vous voulez qu'il le rassure, maintenant? il aimerait bien partir, là, genre, salut, on en discute après, bisous, ce serait plus simple, et il aime la simplicité, voyez, mais, non, non, il reste là.

alors que vos peaux commençaient à fondre puis à fusionner sous la chaleur de vos deux corps emmêlés, tu entends vaguement toquer contre une porte puis une voix s'élever. d'ordinaire tes pensées se seraient dirigées vers un voisin éméché trop tôt ayant oublié ses clefs et se trompant de porte mais, tu reconnais immédiatement cette voix qui prononce ton prénom par deux fois. basile. tu te figes comme si t'avais croisé le regard de méduse et ceux d'alban lient soudain une relation passionnelle avec la panique. t'étais sur le point de t'éloigner de ses genoux et te relever pour chercher ton t-shirt à remettre, mais basile vous prend de cours en faisant irruption, en ouvrant la porte sans frapper, sans vous laisser le temps de réaliser que votre moment est terminé. il vous surprend dans cette position intime, anéantie d'un seul regard la pureté et l'innocence qu'il te restait à ses yeux et la confiance qu'il avait offerte à alban. peut-être qu'un jour vous en rirait, de cette situation, mais pour l'instant tu perds toutes tes couleurs, tu te décomposes sous son regard inquisiteur, médusé et jugeur. tu te détaches d'alban d'un bond et te couvre la poitrine avec tes bras. basile.. quand on toque on attend que quelqu'un dise "entrez" toi qui hésitait à parler à ton frère de ta relation avec alban, toi qui ne savait pas comment aborder le sujet, voilà chose faite. t'aimerais dire "c'est pas ce que tu crois", mais si, c'est entièrement ce qu'il croit et ce qu'il voit, t'aimerais ajouter "on va tout t'expliquer" mais au fond, vous n'avez aucune explication à lui donner, aucun compte à lui rendre, c'est ton frère, c'est son pote, ça ne lui donne pas le droit de tout savoir sur votre vie à chacun. t'es trop gênée pour regarder alban, trop déstabilisée par cette irruption, trop déshabillée pour prendre l'avantage sur la situation.