est-ce qu'ils feront que parler, que se sourire. est-ce que cela restera platonique.
la culpabilité prendra-t-elle place dans le jeu ? parce que ça peut aller si vite.
pas un flunch alors. c'était pour rire.
il laisse le silence s'immiscer entre ces quelques mots. il se demande c'qu'elle va penser, comment elle va réfléchir à ce rire. va-t-elle élargir sa bouche et faire du bruit ? il sait que non, pour alors elle aura compris.

mais c'est pas drôle Ily, arrête de rire, reprends un peu d'air vas-y, est-ce-que c'est pour ça que l'herbe tu la roules entre tes doigts sans arrêt, est-ce-que ça te soulage ? elle, elle bouge pas, elle est statique, presque comme l'image qu'elle renvoie sur l'autre écran en face, elle lui dit pas tout ce qu'elle a dans la tête mais c'est un chaos, ça c'est sûr et puis ça s'enfonce de plus en plus entre les draps. alors elle serre les cuisses, elle s'empêche d'exister, c'est plus facile comme ça, ça fait moins mal comme ça.
— j'ai changé d'avis, je veux bien venir.

le regard dans le vide, la voix de la jeune fille le réveille, l'anime.
avoir un moment pour la vie. this moment 4 life.
et il restera qu'à rattraper le bouquet à la fin de l'histoire.
il sourit, ily.
il veut vivre, pas mourir. mais pas tout l'monde y arrive.
et elle, elle arrive.
quand ? maintenant ou demain ? ou jamais, peut-être.

— maintenant elle lui dit, avant qu'elle change d'avis. me fais pas changer d'avis, elle prie pour elle-même, dans ses cachettes mortelles, le creux de ses mains où appuient ses ongles nerveux, le bout de ses oreilles qui se colorent pour pas qu'elle se foute plus mal. mais c'est trop tard de toute manière, elle l'a fait le faux pas
et elle le voulait c'est ça le pire.
y a rien de plus chaotique que ces deux là, perchés sur le bord de - ils savent pas trop quoi, si ce n'est que ça a trop de couleurs, que c'est trop beau pour durer - y a des chuchotements qui se perdent et elle se lève, tourne l'écran avant d'enfiler des fringues correctes. Isma elle a pas le temps, pas le temps de s'en vouloir, de se détester pas encore. ça viendra plus tard, ça elle est sûre.

ily la voit bouger, se lever, parler et s'en aller.
il bondit, cri pour qu'elle l'entende :
tu veux manger quoi en vrai ??
histoire qu'elle vienne pas lui faire à manger, mais qu'elle vienne pour un midnight snack de reine.
il veut lui faire le monde dans l'assiette, un truc qu'elle aime, un truc qui lui plaise.
il se demande si demander à serge son plat préféré est une bonne idée. jamais, alors faut qu'elle réponde.

— ce que tu veux
elle se tord entre ses mensonges, ses sourires, ceux donnés à Serge ont soudain moins de sens, il est comme une fleur qui se referme et ne veut plus du soleil, mais c'est elle qui vient de tout éclipser alors elle se débat dans ce monde fantôme qui ne veut pas la laisser s'échapper. Isma elle s'en fout, elle veut claquer la porte et s'en aller voir toutes ses trouilles se décomposer devant Ily. parce qu'il a a cet effet dévastateur depuis le début, c'est un peu le destructeur, Ily. il l'sait pas mais il doit bien s'en douter; ils sont tous les deux en train de tout démonter.
— des tacos ?

des tacos, et puis elle viendra seule ?
ily se demande si c'est bien. il a un doute, l'heure a tourné.
tu veux pas j'viens te chercher ?
entre les lignes il lui murmure qu'il veut pas qu'elle se fasse attraper par le premier fou venu.
il veut la protéger et ça passe par là.
qu'elle dise oui, elle a pas le choix.

les rues seront tes monstres et les lampadaires tes espoirs.
elle préférerait s'faire enlever plutôt que ses douceurs - mais à la place elle sourit, elle a son vieux pull sur le dos quand elle remet l'écran face à elle. -
— de quoi t'as peur, toi ?
question générique aux mille réponses, Isma va rejoindre les enfers un instant pour le trouver mais faudra surtout pas, surtout pas le regarder.
parce que qui sait ce qui pourrait arriver, est-ce-qu'il disparaîtrait ? elle a pas envie, Isma, elle lui dit pas oui, mais elle lui dit pas non.

il a le regard visé sur son écran, il l'attend, qu'elle entende son appel.
tu peux te faire enlever, j'voudrais pas qu'on appelle les hendeks pour un truc aussi con.
en faites c'est risquer de te perdre qui le fait vibrer. alors il se lève, attrape un teeshirt.
donc reste où t'es, j'viens te chercher.
il se retourne, fini de s'habiller. il espère qu'elle ne fera pas sa tête de mule à ne pas l'écouter.

— Lyon ça craint pas si ?
elle a l'ignorance dans la voix mais encore plus l'envie de s'bouger, c'est peut être un miracle parce qu'à cette heure, elle s'laisse d'habitude glisser sous les draps, abandonner aux solitudes. et puis y a Ily, espèce d'autre miracle qui se dresse entre toutes les désastreuses aventures, sans se tenter au diable.
il joue pas, il reparle pas de Serge, sur l'écran elle le voit dans ses yeux, elle entend plus du tout le reste, elle entend ses inquiétudes mais l'appartement s'est rendormi soudainement et plus aucun bruit ne perce sinon le souffle de la machine infernale.
— j'peux te rejoindre.
elle ferme l'ordi, elle va lui donner l'tournis, elle a pas compris qu'il est entre ses doigts, Ily.

tout craint pour une enfant comme toi ! il voudrait lui hurler dessus, sauf qu'elle a déjà clot la conversation.
merde qu'il murmure à lui même.
il enfile les deux claquettes qui trainait par terre, une lacoste, une fila, elles iront très bien avec ses chaussettes, manière, et il sort de l'appartement. faisant s'envoler tout c'qu'il y a autour.
il veut la trouver avant que quelqu'un la trouve.

(j'en peux plus de toi ce rp devient un troll)

c'est en faisant les gosses qu'on s'fait adultes alors elle s'en fout - elle s'en est toujours foutue de la potentielle brutalité du monde tant qu'elle pouvait se sortir de son cercueil pixels de temps en temps. - c'était pas très facile mais dernièrement y avait eu quelques météorites posées devant son nez et elle avait plus trop eu le choix.
elle a une pensée pour Serge (parce qu'il faut en avoir, c'est son petit copain, elle se le rappelle) et une autre pour la nuit qu'elle voudrait bien épouser sous une autre forme, dans une autre nuit. les rues sont endormies.
et elle, elle regarde son portable une seconde.
— tu sais que je connais pas la ville, pas vrai ?

si c'est un autre qui la trouve il s'en voudrait tellement, les rues il sait combien elles ne sont pas sûr, surtout la nuit, surtout ici. tout peut aller si vite. il ne laisserait pas ses soeurs sortir seules comme ça, comme elles le veulent, alors pourquoi laisser celle qui fait battre son coeur faire de même ? il ne serait pas un bon chevalier, il serait pas mieux que son rival, serge.
alors il marche dans les rues. il connait la ville par coeur, comme le fond de ses poches. il marche en direction de l'immeuble de isma.
il reçoit un message de la belle. il le savait. il répond.
forcément, dis moi où tu es, j'viens te chercher.
le prince qui vole au secours de sa douce.

le manteau épais de la nuit embrase les rues d’une pâle lumière, il y a personne autour, elle se prend pour une aventurière; entre leurs deux quartiers il y a une belle trotte alors elle se bouge un peu, c’est pas qu’elle ignore son portable mais presque. Ily il en a toujours trop fait avec elle à croire que c’était une jungle urbaine dehors. Isma elle y croit pas mais elle croit pas à grand chose en ce moment. D’ailleurs elle a pas les yeux rivés sur son fond d’écran où elle pose avec Serge et un géant sundae en plein milieu de l’été. Serge il a pas le droit d’être en colère, après tout c’est plus une gamine elle fait ce qu’elle veut. voilà c’est ce qu’elle se dit alors qu’elle glisse dans les bras de son amante pour quelques heures; Isma s’arrête à un arrêt de bus illuminé au néon coloré. elle explique à Ily qu’elle est à x endroit qu’il doit pas se faire y idée, mais c’est Ily.

il joue à l'homme idéal. un mec qui serait bien sous toutes les coutures. un bel homme qu'on pourrait présenter à ses parents. c'est pas un garçon comme ça, ilyas. ouais il est pas dans ce style là. déjà parce que c'est un connard, qui fait ça a la meuf de son meilleur pote. qui ? même si lui-même est le dernier des cons, ça s'fait pas. même si l'amour ça se contrôle pas. contrôle toi.
il a une hésitation, il se demande si c'est bien. et puis il se dit que si serge la laisse faire, c'est que c'est pas grave. il a cas la surveiller, et au pire ça reste dans la famille. et puis il dirait qu'il l'aime pas, isma, c'est que l'une parmi tant d'autres. tu t'souviens d'celle de samedi soir ? non, moi non plus. ben voilà isma c'est (pas) pareil. isma ...
elle est sur le banc en face.
ça y'est t'es là. juste ... à porté de main.
le coeur de ily s'emballe. il a la trouille. il est loin, on le voit pas. lui il te voit. et il dit rien. il bouge plus, il a bugué.

l’attente mortelle, elle sait plus donner de noms aux choses isma. elle appellera ça son petit chaos, ça restera pour elle un secret bien gardé; c’est pas grave si j’suis pas très belle à l’intérieur elle s’dit, j’essaie de pas croire aux charmes que j’accumule à la maison qu’elle s’dit. dans la nuit y a quelque chose de rassurant elle saurait pas dire quoi; peut être que c’est parce que tout le monde ferme sa bouche et que ses yeux magiques veillent sur elle, autour de son cou, sur son sac, sous ses bretelles. isma elle a ce problème depuis le début, elle sait pas quand s’arrêter. au bout d’un moment c’est pas son coeur qui va lâcher c’est le mécanisme déjà déconnant d’Ily.
isma elle lui dit pas mais elle sait qu’il prend pas autant soin de lui qu’elle voudrait, il a tendance à se laisser tomber dans les bras des filles (et c’est normal, c’est normal lui il appartient à ceux qui se noient dans les corps et dans les âmes) elle espère pas trop.
elle sait qu’elle s’fait des films; il aura pas l’air d’une comète, juste d’un homme au milieu des silences téméraires de post-minuit.
la silhouette l’attrape de loin, Isma a les pupilles dilatées, le souffle ravalé, ses mains toutes chaudes, sa peau toute moite.
— ily, t’es là
ça y est, j’l’ai dit.
son prénom,
juste en face.
la cage où reste toute ma vie, elle risque d’exploser.

tout est si simple, semble. un pas, un bruit, un geste, un regard et elle sait qu'il est là.
elle l'a cramé. tu l'as vu, aperçu alors qu'il essayait de se cacher. la peur au ventre de se dire que ça y'est. internet est passé. la trahison est là, à quelques mètres. il peut encore courir de l'autre côté, dire qu'il s'est trompé. s'excuser platement auprès de tout l'monde.
j'sais pas où j'avais la tête. désolé.
oui dit-il timidement.
il sort des buissons, il se montre.
ce grand garçon qui a peur de tout, sauf de la nuit. il sait pas trop où se mettre ni quoi dire.
il dit rien d'autre, il s'avance juste, vers toi.
isma juste là.

la nuit les embrasse, elle s’plaint pas, la nuit les embrasse, elle s’avance, elle réduit les mètres, les transforme en terribles distances interrompues. il a la tête pleine ? elle aussi. la nuit les enlace et les centimètres eux s’réduisent pas. Isma elle ose pas bouger, elle sent que ça s’emmêle entre leurs souffles, c’est là qu’internet sert, c’est là qu’il est comme une bouée de secours, qu’il tient par les hanches et puis fait danser, doucement, mais à la place Isma, elle le regarde. Ilyas. Ilyas il sait probablement pas danser et elle non plus ? alors elle se demande pourquoi elle le prend par la taille, trace la route entre son bras et sa main, elle est gentille Isma quand elle fait ça. en fait elle a jamais été aussi gentille.
— viens, elle lui dit
elle lui dit comme une parole en l’air (elle va s’effacer comme toutes les autres, y aura plus de preuve, t’as pas à t’en faire).
y a personne dans les rues, y a que nous dans les rues. et la nuit nous embrasse.

et une enfant s'approche. une inconnue, une petite. un bout de quelque chose. un insecte qui court, un chat qui bondit, un chien qui retrouve son maitre. ilyas a du mal. internet c'est une bulle et lorsqu'elle éclate, il sait plus quoi dire.
à travers un écran il est capable de tout. il a honte de rien, au pire c'est pas grave, au pire c'était pas lui, un sosie, un pirate. mais dans la vraie vie il a personne sur qui remettre la faute. et ce sera la sienne, de faute, à lui, pas à toi. t'y es pour rien, isma.
et elle lui attrape le bras. la peau de la douce le caresse. il regarde ce corps étranger. il sait pas quoi dire, quoi faire. il comprend mieux pourquoi c'est serge qui l'a eu. ilyas c'est un con pas capable.
du coup c'moi ilyas. comme si elle savait pas.
mais lui il sait pas, comment briser cette gêne, ce silence.

Isma c’est pas un fauve, c’est encore un bout d’air dans toute la bulle infernale du monde, elle a pas la bonne mesure, c’est ça qu’ils vont se dire si le miracle explose en d’autres miracles, si y a plus que du vent, si y a plus rien. mais elle est là, elle a du mal à bien tenir debout, son rire perce la rue et puis se propage (à la façon des fleurs, celles qui s’mettent contre le courant), il se propage et puis il vient s’mettre contre les joues d’Ilyas.
— moi, c’est Isma.
elle chantonne pour lui, un de leurs mémorables désastres, ceux qu’ils se lançaient au visage quand y avait qu’eux deux contre le reste de l’univers. elle veut lui dire, Ily ? on a créé un univers, mais à la place y a ses doigts qui s’mélangent aux siens, comme des soucoupes volantes s’attacheraient à des étoiles déjà éteintes.
— quoi de beau dans ta vie ?